Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

nicolas sarkozy - Page 4

  • Tunisie: les conséquences du raté français

    Ces dernières semaines, le rôle et l'image de la France ont été sérieusement ébranlés sur le continent africain. L'effondrement du régime Ben Ali a cristallisé les critiques contre notre pays. Les autorités ont regatunisie-manifestations.jpgrdé avec indifférence voire méfiance le soulèvement populaire, n'y voyant pas l'aspiration profonde du peuple à recouvrer une liberté si longtemps confisquée. On se souvient de l'enthousiasme avec lequel avait été accueilli la contestation étudiante en Iran voici deux à trois ans. Enthousiasme à géométrie variable! Mais les errements ne se sont pas arrêtés là. S'apercevant de la détermination sans faille des manifestants, les autorités françaises ont paru se porter au secours du régime dictatorial en lui proposant, par la voix du ministre des Affaires étrangères, de lui donner un coup de main pour le maintien de l'ordre. Que proposait exactement la peu inspirée Michèle Alliot-Marie? Mystères et boules de gomme, mais le trouble est profond. Du temps de la révolte perse, on n'a entendu telle proposition en faveur du régime des mollahs...

    On aurait espéré qu'une fois le dictateur kleptomane envolé vers les contrées saoudiennes, la France se ressaisirait en saluant le renversement par le peuple, relativement pacifiquemben ali.jpgent, du régime à bout de souffle (ce que n'a pas manqué de faire Barack Obama). Eh bien non, notre diplomatie s'est contentée de « prendre acte » du changement. Pour éviter d'accabler encore les autorités, on oubliera les déclarations complaisantes de quelques ministres, comme Bruno Le Maire (promis, dit-on, à un bel avenir) ou de Frédéric Mitterrand. On mettra cela sur le compte de la fatigue responsable du manque de lucidité là où d'aucuns feront le lien avec quelques voyages gracieux au paradis tunisien dont on dit que sa majesté Ben Ali n'était pas avare.

    Ce raté total de la diplomatie française n'est pas due au hasard. Puisqu'au Maghreb et dans la région, le seul mot d'ordre est (était?) la lutte contre l'islamisme, la Tunisie laïque était un rempart précieux. Tant pis, dans l'esprit de nos stratèges français, si s'était organisé dans ce petit pays un système mafieux de prédation de toutes richesses au profit notamment de la belle-famille du président! Tant pis si les journalistes, les avocats et les simples citoyens étaient régulièrement arrêtés, brimés voire torturés! Tant pis enfin si s'était installé à 2 h de Paris un culte de la personnalité hallucinant digne de la Roumanie de Ceaucescu! Puisque la (dé)raison d'Etat l'imposait.

    Cette attitude contraire à l'esprit des droits de l'homme est d'autant plus insupportable que Nicolas Sarkozy maison (31).jpgdonne des leçons de démocratie à la Côte d'Ivoire. Il a tout à fait raison, du point de vue du droit international, de ne pas reconnaître le président auto-proclamé Laurent Gbagbo et de soutenir le rival Alassane Ouattara, mais la leçon a du mal à passer après cet épisode tunisien. Une partie des Ivoiriens et des Africains soutient d'ailleurs Gbagbo plus pour faire un pied de nez à la France, que par sympathie pour un homme qui a montré plus de talent dans la ruse que dans le courage politique. Le discours que Nicolas Sarkozy prononça avant les fêtes où il posa un ultimatum à celui-ci pour quitter le pouvoir illustrait bien cette incompréhension totale de la psychologie africaine de celui qui fit ce discours ahurissant de Dakar, à l'été 2007, dans lequel il considérait que l'homme africain n'était pas entré dans l'histoire.

    La conséquence de cette diplomatie des droits de l'homme à géométrie variable est de discréditer totalement toute parole française. Cela ne sert qu'à renforcer le cynisme de certains dirigeants africains qui tirent leur légitimité d'un affrontement avec la puissance occidentale. Ces temps-ci, le pouvoir ivoirien se compare au destin de Lumumba, leader congolais assassiné par une alliance entre le clan Mobutu et l'ancien colonisateur belge. L'analogie est grossière sur tous les plans, mais l'attitude intransigeante ici, complaisante là, de notre pays renforce le sentiment que la France est restée colonisatrice. Dans l'esprit de beaucoup, si celle-ci soutient Ouattara, ce n'est pas au nom de principes démocratiques (le perdant s'incline devant le gagnant) mais au nom d'intérêts bien compris (Ouattara, ayant eu des responsabilités au FMI notamment, est considéré comme très proche des intérêts occidentaux). L'irresponsabilité française face à la révolution tunisienne ne peut que renforcer ce refus d'entendre toute parole -même juste- venant de l'hémisphère nord.

    En 2008, le Suisse Jean Ziegler expliquait, dans son livre La Haine de l'Occident (Albin Michel), pourquoi les peuples et les élites du Sud n'ont plus aucune confiance dans les pays riches et pourquoi, à la faveur de l'impossibilité de voyager (visas difficiles à obtenir), des politiques commerciales agressives et des hypocrisies diplomatiques, montait un sentiment de haine facteur de divisions et de montée de périls (comme on le voit dans le Sahara avec l'impunité dont jouissent les militants d'Al Qeida. Sans vouloir lui donner de leçon, on conseillera au Président Sarkozy de se précipiter sur ce livre pour mieux comprendre ce qui se joue aujourd'hui dans les rapports entre pays riches et pays pauvres.

     

  • Conflit social: qui a "gagné"?

    Voici deux semaines que le conflit social autour de la réforme des retraites s'est emballé. Alors que la loi degrève retraite.jpgvrait être votée dans deux ou trois jours par le Parlement, un premier bilan peut être esquissé. Certes, le mouvement est loin d'être terminé, les blocages de raffinerie, malgré les réquisitions des pouvoirs publics, se poursuivent, entraînant une pénurie partielle de carburant. Mais, on sent bien, à la faveur des vacances scolaires, très opportunes pour le pouvoir, et la fin du feuilleton législatif, que la protestation sociale va baisser d'un niveau. Que retenir de cette rentrée sociale particulièrement agitée? Trois enseignements peuvent être tirés:
     

    1/ Le pouvoir n'a rien cédé.

    En France, il est tout à fait nouveau qu'un mouvement social aussi important dans la durée et par la mobilisation populaire (sans doute plus de cinq millions de personnes ont, à un moment ou un autre, manifesté contre le projet de loi) ne donne aucun débouché politique. Le joli mois de mai (68) s'était traduit par des accords sociaux importants (sur les comités d'entreprises, la revalorisation des salaires) sans oublier la réforme de l'université. L'importante mobilisation des cheminots en 1995 avait conduit à l'abandon du projet de réforme des régimes spéciaux pour les retraites (déjà!). Le mouvement anti-CPE de 1996 avait abouti à sa non-application, malgré l'adoption du Contrat première embauche par le Parlement. Cette fois-ci, à part de très minces aménagements pour les mères de famille et les parents d'enfants handicapés, le pouvoir n'a rien lâché. On pouvait, par exemple, penser qu'il a lâché du lest sur le départ à 67 ans pour les personnes qui ont eu des carrières en dent de scie car il apparaissait choquant que des travailleurs déjà peu gâtés par la vie dussent trimer si longtemps. Dans une posture à la Thatcher, le Président a affiché sa détermination, imposant même au Sénat si jaloux de son indépendance, une accélération de l'examen du texte. Est-ce que cette fermeté sera analysée comme un élément positif, traduisant une capacité à résister à la pression extérieure, ou, au contraire, comme un entêtement fâcheux synonyme de refus de dialoguer? Il est encore trop tôt pour répondre à cette question, mais on observera qu'au moment le plus critique – montée de la pénurie d'essence, mobilisation massive des lycéens avec ici ou là des débordements ultra-violents – les Français ont continué à exprimer un soutien très large à ces grèves qui, pourtant, compliquaient les conditions de vie des gens, en compromettant certains départs en vacances.

     

    2/ Le mouvement social est resté uni de bout en bout.

    Même si la fin de conflit pourrait se faire dans la désunion, on notera que pour la première foisleaders syndicaux.jpg depuis bien longtemps, le front syndical est resté soudé, malgré les différences évidentes de sensibilité, par exemple entre Solidaires et la CFDT. Cette centrale qui n'a reçu aucun gage de la part du pouvoir a fait le choix du conflit jusqu'au bout, ce qui marque une vraie évolution dans la culture cédétiste sensible à l'idée du compromis. Le pouvoir aura donc réussi à radicaliser le syndicat le plus réformiste et à ne pas isoler les éléments les plus radicaux qui, par leur attitude responsable, ont gagné en crédibilité. Le pouvoir espérait par ailleurs exacerber les tensions au sein de la CGT entre une direction plutôt ouverte au compromis et privilégiant un accord solide avec la CFDT et certaines fédérations prêtes à en découdre et à se rapprocher de SUD. Sauf évolution de dernière heure, il n'en a rien été et cela marque un échec pour la stratégie de division tentée par le pouvoir sarkozyste. A l'avenir, toute volonté de réforme jugée libérale sera sévèrement combattue par un front syndical qui, malgré sa défaite sur le papier, a marqué des points pendant ces semaines de mobilisation.

     

    3/ La gauche a été très présente, mais pas toujours convaincante.

    De bout en bout, les partis de gauche ont collé au mouvement social, participant à toutes les manifestations et ne faisant aucun commentaire sur la gestion du conflit. C'est la preuve d'un vrai respect de l'autonomie des militants syndicaux. Pour autant, la gauche est restée peu loquace sur les solutions qu'elle propose pour sauver les retraites. Celle-ci a louvoyé entre une négation du problème (certains affirmant que la question démographique n'est pas si grave que cela...position irresponsable) et le flou autour des propositions. On n'a toujours pas compris si le PS est favorable à l'allongement de la durée de cotisation (ce qui semble être la position majoritaire) ou au maintien du nombre d'annuités avant les réformes Balladur-Fillon. La radicalité de l'affrontement entre la rue et le pouvoir a masqué le manque de clarté de la gauche sur cette question. Certains objecteront que le PS a élaboré un contre-projet, mais on s'étonnera tout de même qu'il ne l'ait pas mis plus en avant. Sans doute parce qu'il aurait été jugé trop modéré par un mouvement social dont une partie a décidé, dans un élan de générosité pas toujours responsable, de faire fi de toutes les contraintes de l'environnement international. Le retour sur terre risque d'être un peu difficile...

     

     

  • Le grand saut vers l'inconnu

    Rarement semaine ne s'est annoncée avec autant d'incertitudes pour le gouvernement que celle qui démarre ce lundi 11 octobre. Une troisième journée de grève générale depuis la rentrée est prévue ce mardi dans tout le pays, qui, à la différence des deux précédentes en septembre, pourrait être suivie d'un appel à la grève générale. Certains convoquent (par nostalgie ?) le souvenir de l'automne 95, mais la situation est fortement différente. D'abord parce que les régimes spéciaux (RATP, SNCF, EDF) ne sont pas directement mis en cause par la réforme Fillon-Woerth. Ensuite parce que le contexte politique a profondément changé en quinze ans. En 95, Jacques Chirac venait d'être élu sur une promesse de progrès social partagé et dès l'automne, le Premier ministre Alain Juppé, droit dans ses bottes, avait annoncé qu'était venu le temps de la rigueur et que les "privilèges" des salariés protégés étaient à revoir. Douche glaciale pour ceux qui voulaient mordre dans la pomme promise par lSarko heureux.jpge Président!

    Tout autre est le contexte en 2010. La rapide agonie de la présidence de Nicolas Sarkozy laisse le pays dans un état de désarroi total. Certains cèdent au fatalisme, d'autres à une colère qui peut prendre des formes imprévues. Personne, y compris parmi les proches de l'UMP, ne comprend comment fonctionne ce pouvoir. Tout est curieux, voire inquiétant, dans sa façon de faire. Le fait d'annoncer en juin un remaniement ministériel à l'automne aboutit à mettre tous les ministres – et le premier d'entre eux – dans un état d'inquiétude peu propice à l'efficacité.

    Le fait de maintenir Eric Woerth à un poste aussi sensible que les Affaires sociales conduit, à mesure que les révélations se font jouBettecourt - Woerth.jpgr sur ses étranges collusions, à ridiculiser tous ses propos en les reliant à la nauséabonde affaire Bettencourt. Le fait d'imposer une réforme importante, celle des retraites, sans négocier avec les partenaires sociaux (alors qu'on avait promis le contraire pendant la campagne électorale) puis, sous la pression de la rue, à lâcher une à une des petites choses amène les manifestants à se dire que des acquis importants peuvent être obtenus par le blocage du pays. D'où la tentation de la stratégie du pire. Le fait de répondre à la centaine de parlementaires UMP qui ont demandé de remettre en cause le bouclier fiscal par un « circulez, y'a rien à voir » conduit les principaux soutiens du pouvoir à prendre de la distance.

    Tout est contre-productif dans les actes de Nicolas Sarkozy, y compris sa ridicule visite à Rome auprès du pape. Les catholiques français ne sont pas complètement demeurés pour ne pas y voir une opération de récupération alors que rien dans sa politique, depuis son goût immodéré pour l'argent jusqu'aux poursuites contre les étrangers, n'est compatible avec l'Evangile. Cela peut même avoir l'effet inverse de radicaliser ses adversaires chez qui trainent un vieux fond d'anticléricalisme mal digéré...

    Nous voilà donc à quelques heures du grand saut vers l'inconnu. Tout est possible, y compris un blocage anarchique du pays avec son lot de violences et d'exaspérations. J'ai le sentiment cependant que le pouvoir ne pourra pas jouer le coup de juin 68 lorsque le général de Gaulle activa la corde de la peur face à la chienlit. Pour beaucoup de citoyens, même ceux qui seraient enclins à soutenir la réforme des retraites, la chienlit est amenée depuis longtemps par le style brouillon de Sarkozy, par ses changements d'objectifs incessants (la relance puis l'austérité, par exemple) et par son entêtement à être le « Président des riches », pour reprendre le titre d'un livre récent, sans oublier sa propension à donner des leçons au monde entier, ce que ledit monde commence à trouver franchement ridicule.

  • Pourquoi Sarkozy n'a pas encore perdu

    La partie est-elle bien engagée pour la gauche et fort mal pour la droite? La fin de l'été peut donner cette impression à dix-huit mois de l'élection présidentielle. L'offensive sécuritaire-Aubry.jpgxénophobe du Président de la République et de sa garde rapprochée a suscité une levée de boucliers des associations et partis de gauche (classique...), mais également – et c'est plus embêtant – de l'épiscopat catholique. La violence du propos sarkozyste contre les Roms, notamment, suscite un vrai malaise au sein des cadres de l'UMP, et notamment chez tous les anciens Premiers ministres (Juppé, Raffarin et bien sûr Villepin). L'actuel a même, par une formule jésuitique, pris ses distances avec la volonté de l'Elysée de trouver un nouvel bouc-émissaire (« l'affreux gitans voleur de poules ») aux difficultés économiques, sociales et politiques. Ce premier coup de canif public à la solidarité entre Sarko et Fillon annonce sans doute le prochain changement de locataire à Matignon dans quelques semaines.

    L'interminable feuilleton Woerth amène, jour après jour, des éléments qui semblent confirmerBettecourt - Woerth.jpg des connivences coupables entre l'ancien ministre du Budget (et ancien trésorier de l'UMP) et la première fortune de France. L'idée que ce gouvernement est complaisant avec les riches et impitoyable avec les faibles (Roms, mais aussi chômeurs en fin de droits, petits retraités...) fait son chemin dans la société.

    Pour autant, la gauche doit-elle claironner sa victoire prochaine? Elle se garde bien de le faire, mais on sent ici ou là une certaine euphorie gagner ses soutiens, d'autant qu'une récente enquête montre une large avance des deux candidats favoris (DSK et Aubry) sur le président sortant. Dans cette affaire, il faut garder la tête froide. L'issue du scrutin à venir est loin d'être acquis. Plusieurs raisons plaident en faveur de la plus grande prudence.

    Dans le camp présidentiel, on devrait, avec l'arrivée du nouveau gouvernement, assister à Sarko grimace.jpgl'émergence d'un nouveau discours. Dans un contexte de large incertitude, de difficile reprise économique et de tensions internationales (l'Iran, l'Afghanistan et peut-être Israël-Palestine), le pouvoir pourrait proposer de sécuriser la vie des Français. Pas seulement sur le plan de la sécurité des biens et des personnes, mais aussi par rapport à la vie quotidienne et les grands dossiers du moment. Il est difficilement imaginable que le gouvernement ne mette pas de l'eau dans son vin dans sa réforme des retraites pour la rendre plus acceptable. Pas simplement parce que la mobilisation à venir – du 7 septembre – s'annonce massive, que le ministre du Travail est passablement affaibli, mais aussi parce qu'il est important politiquement de donner le signe que le pouvoir entend la protestation populaire.

    Cet engagement à sécuriser le quotidien des Français, s'il se vérifie, devrait avoir pour conséquences logiques de conduire à un assouplissement du bouclier fiscal et un freinage dans la volonté de réduire les déficits publics. Quitte à se fâcher avec l'Europe (mais cela ne peut pas faire de mal dans l'opinion publique), le pouvoir pourrait choisir une voie audacieuse qui couperait en partie l'herbe sous le pied à la gauche. Mais aura-t-il la clairvoyance de s'éloigner des canons néo-libéraux qu'assènent à longueur de journées ses principaux soutiens, y compris financiers? Sous cela, on voit mal comment l'UMP pourrait reprendre un tant soit peu l'initiative. Sans cela, les tensions internes dans le parti gouvernemental vont s'exacerber, les soutiens à la candidature de Dominique de Villepin affluer et la voie centriste se dégager.

    Du côté de la gauche, le mieux enregistré ces derniers mois ne saurait signifier que le ciel est dégagé. D'abord, parce que la compétition risque d'être plus rude lors de la désignation du candidat socialiste. Avec un affaiblissement sans précédent du Président de la République, de nombreux challengers vont se sentir pousser des ailes. François Hollande, Ségolène Royal voire Manuel Valls peuvent croire en leurs chances de l'emporter face à un sortant si affaibli. Ils doivent dès lors l'emporter lors des primaires, ce qui devient possible si DSK, mobilisé par une sortie de crise difficile, privilégie le confort américain à l'incertitude française. Comme les cicatrices du passé sont loin d'être refermées (l'affrontement Aubry-Royal, mais aussi le ressentiment de François Hollande ou de Bertrand Delanoë à l'égard de l'actuelle première secrétaire), cette épreuve des primaires, louée comme le nec plus ultra de la démocratie moderne, pourrait se transformer en foire d'empoigne. Et à ce petit jeu, il faut compter sur les leaders socialistes pour se surpasser.

    Second facteur de prudence: le flou des propositions. Même si l'arrivée de Martine Aubry a permis d'ouvrir divers chantiers de réflexion, le vide programmatique depuis le début des années 2000 n'a pas été comblé en quelques mois. Sur la conversion écologique de l'économie, sur la réduction des déficits publics, sur la rénovation des services publics, mais aussi sur la sécurité, on sent le parti tiraillé et souvent divisé. Confronté à ce risque, la tentation est grandM.jpge d'entretenir un certain flou et de réfugier dans les généralités. Ce qui pourrait faciliter la percée de la candidate d'Europe écologie ou celle du candidat de « l'autre gauche », sans doute Jean-Luc Mélenchon.

    La troisième incertitude tient à la question des alliances. Le PS ne peut l'emporter seul. Il devra compter avec un courant écologiste qui pourrait peser 10% et une gauche de la gauche participationniste qui pourrait s'en approcher. La configuration de la gauche plurielle de Lionel Jospin en 1997 était totalement différente, ce qui suppose pour le PS d'en finir avec ses comportements hégémoniques et son sentiment de supériorité. Il faut espérer pour ce parti que Martine Aubry aura l'habileté d'un François Hollande et une autorité suffisante vis-à-vis des barons socialistes pour négocier une alliance équilibrée et durable.

    Comme on le voit, la route vers une victoire de la gauche au printemps 2012 est encore pleine d'embûches. L'euphorie n'est donc pas de mise, mais l'excès de prudence et la tiédeur non plus. Les conditions sont potentiellement réunies pour éviter un troisième échec successif de la gauche à la présidentielle. Celle-ci a la responsabilité historique de ne pas les gâcher.